KAM - Sédentarisation

Cette semaine je fête mon premier mois de voyage solitaire. Le temps est passé à la fois extraordinairement vite et avec une lenteur visqueuse certains soirs de bivouacs, mais un mois quand même ! Le rythme de ces derniers jours est si différent du reste de ce voyage, mes déambulations quotidiennes ont cessé et c'est au même endroit que je me réveille tous les matins depuis 10 jours. Et le confort d'une douche chaude tous les soirs n'est pas pour me déplaire ! Bonne lecture !

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Lundi 13/03.

Le réveil est étrange. L'impression d'être encore ivre, un mal de ventre et de crâne dignes d'une gueule de bois de lendemain d'une sacrée pistache. Et pourtant, même s'il me faut quelques minutes pour en être certain, je n'ai rien bu la veille. Sûr et certain. Je descends déjeuner, ça finira bien par passer non ? Zoé se lève une petite heure plus tard et m'annonce se sentir mal aussi. Bon, on a mangé quoi encore là ?

Un coup de fil à Dimitrios pour lui annoncer qu'on ne pourra pas bosser dans cet état là, il passe nous chercher et on file à l'hosto : des fois vaut mieux pas rigoler avec les intoxications alimentaires... 

Après une petite journée passée dans les couloirs de l'hôpital grecque, on nous annonce qu'on a du manger un truc pas frais, pas de quoi paniquer. Merci. "Prenez soin de vos estomacs dans les jours qui viennent, ça va passer." Aller, on englouti une plâtré de spaghetti chez Dimitrios avant qu'il ne nous remonte "au village". On en profite pour embarquer avec nous Kayla, une autre wwoofeuse arrivée la veille. Un thé et au lit, vivement que cette impression d'ivresse s'estompe !

 

Mardi.

Aujourd'hui on va découvrir l'une des parcelles d'oliviers de notre hôte. Il passe nous chercher autour de 13h pour nous y conduire. Petit détour par la coopérative dans laquelle il fait presser ces olives, visite expresse des locaux, quelques mots sur les machines, et les différents critères de qualité d'une huile olive : on retiendra que si la mention "extra virgin" - faisant référence à l'acidité de l'huile - est absente, c'est vraiment naze comme jus, faut pas prendre.

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Puis au boulot : la plantation a déjà été taillée (tronçonnée) mais un volume monstrueux de branches entremêlées gît encore au pied de arbres, il faut tout accumuler dans cet angle du terrain pour faire un joli feu de joie ensuite. Toutes les 30 minutes Dimitrios nous interromp en nous invitant à manger une orange qu'il va cueillir dans sa parcelle à 50m. Elles sont sacrément bonnes, on en avale des quantités déraisonnables, leur jus assure notre hydratation, les vitamines dont elles sont gorgées se déversent dans nos muscles torturés de travailleurs agricoles, c'est bon ça ! 

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Retour maison le soir pour un bouillon avant d'aller dormir, demain rebelote mais dès le matin !

Mercredi.

Aujourd'hui retour sur la même parcelle pour avancer le déblayage des oliviers et le pillage des orangers. On s'attelle à la tâche, et ça avance bien : c'est plaisant de voir le sol se dégager au fur et à mesure que le tas du fond du terrain grossit. Le rythme de l'assimilation des vitamines C est bon lui aussi, on finit par s'habituer à travailler avec les mains qui collent, couvertes du sucre du jus d'orange séché. La journée est longue, on est au charbon de 10h à 17h30 et c'est bien KO qu'on rentre à Deliana.  

Jeudi.

Ce matin, la météo est capricieuse. Les averses se succèdent et Dimitrios nous donne une liste des choses à faire sur place : nettoyer la demi centaine (dit comme ça on a l'impression que c'est plus que 50 non ?) de caisses qui seront plus tard remplies d'oranges et citrons et confectionner autant de pièges à mouche qu'on pourra avec la tonne de bouteilles en plastoc entassés sous le porche. On se mets au boulot, régulièrement interrompus par la pluie qui nous intime d'aller boire un p'tit thé à l'abri. Pas pire. On termine nos réserves de fil de fer pour les pièges en milieu d'après-midi et décide d'aller faire un casse dans le super-market le plus proche pour créer une banque de chocolat digne de la série de jours de pluie annoncée par la météo. On ne s'attardera pas à Kissamos, les trombes de flotte qui nous sont versées dessus depuis là-haut nous ont coupé l'envie...

Vendredi. 

Pluie. Pluie pluie pluie. Pluie pluie. Et toujours pas de fil de fer. Le chômage technique nous pousse à la grasse matinée.

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Puis gros p'tit dej de seigneur, étirements, leçon de Grec (les couleurs et les fruits essentiellement), dessins. La journée passe au dessus de nos corps de larves vautrés autour de cette table depuis de trop longues heures. C'est déjà le soir, et aucune de mes deux colocs' n'a vu "Retour vers le futur" alors on terminera cette journée vautrés devant la télé. À deux doigts de finir liquides...

Samedi. 

La météo est meilleure aujourd'hui : le vent chasse peu à peu les nuages. Mais du coup... ça souffle. Et ça caille. Dimitrios est passé nous poser une bobine de fil de fer la veille (et un ravitaillement de nourriture loin d'être nécessaire, on nage dans les victuailles) donc je m'attelle à terminer les pièges. J'en remplis des caisses et des caisses, jusqu'à ce que Zoé m'annonce avoir fait à manger pour le déjeuner : une bonne excuse pour sonner la pause.

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Cet après midi, on par à pied visiter les gorges de Deliana. La Crête, m'a-t-on dit, est réputée pour ses multiples gorges et canyons, et si je n'en ai pas vu tant que ça avant d'arriver là, c'est vrai qu'on en trouve beaucoup dans cette partie de l'île. Notre village ne fait pas exception, il a les siennes aussi, accessibles à pied en moins de 30 min. On s'enfonce donc en suivant le sentier entre les deux falaises qui grandissent au fur et à mesure de notre avancée. C'est vraiment chouette, la rivière est belle et je me retrouve à avoir 8 ans et demi, sautant de cailloux en rocher, m'accrochant à une branche pour changer de rive. Les falaises laissent par endroit place à de grandes pentes abruptes couvertes de cistes, de grandes grottes sont visibles, leurs entrés perchées au beau milieu de piliers de roches orangée (c'est une thématique ici). Arrivés à une petite chapelle blottie au fond de la gorge, je repars sans vérifier que les filles me suivent. Je marche 20 minutes en m'efforçant de siffler de plus en plus fort et en écoutant l'écho de mes stridulations se réverbèrer sur les paroies qui me dominent. Puis je me décide à les attendre. Après ce qui me semble avoir été une éternité, Kayla débarque seule : "Zoé n'est pas avec toi ?" Heu non... Pas avec toi non plus visiblement... Un peu anxieu, je remonte la gorge en courant jusqu'à la chapelle pour m'assurer qu'elle ne se soit pas fait mal quelque part. Rien. Je siffle aussi fort que possible (j'ai les joues echauffées), hurle son nom, rien. Bon. Je me rassure en me disant qu'elle devait me suivre de plus près que je ne croyais et qu'elle a du me passer devant quand j'ai fait pipi à l'écart du chemin, et retrouve Kayla là où je l'avais laissé. On descend la suite du canyon en s'attendant à trouver Zoé au bout. Mais non, elle n'est pas là. Peut-être qu'elle a poussé jusqu'à la maison, pressée de rentrer ? On rentre aussi, de toute façon il va bientôt faire nuit, mais je garde en tête qu'il me faudra peut être revenir avec une frontale ... Tendu comme des crampes, on arrive à la maison, vide. Pas de traces de Zoé. Aussi vite que je peux, j'attrape ma lampe, mon téléphone (qui était resté là) et une paire de serviettes éponges (bah oui si elle a les fesses dans l'eau ça pourra servir...) et repart vers les gorges. Il fait nuit noire maintenant. Je les remonte en courant sur 1/3 en hurlant régulièrement "ZOÉ" entre deux respirations essoufflées, puis entends enfin une réponse : elle est là sur le chemin, elle redescend sans lampe. 

L'EXPLICATION : la chapelle n'était pas le bout du chemin, elle a continué de monter en pensant qu'on suivait. Arrivée en haut elle nous a attendu un moment, puis s'est rendu à l'évidence : on ne viendrait pas. Elle a donc fait demi-tour et elle était en train de rentrer dans le noir sans moyen de s'éclairer quand je l'ai trouvé. Ouf. Grosse ventrée de pancakes devant les deux vollets suivants de la fameuse série cinématographique Spielbergienne des paradoxes spacio-temporels pour terminer tout ça en respirant un peu mieux : on a encore eu d'la chance !

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Dimanche. 

Dimitrios m'a envoyé un SMS : si vous voulez aller voir à la taverne, Jannis le proprio a besoin d'aide les dimanche souvent. Je m'y rends seul ce matin, les filles dorment. À 11h30 je me vois promu au rang d'assistant de Joana, la serveuse en cheffe. L'ambiance est familial dans l'équipe, tout le monde se marre, je ne comprends pas le quart de ce qu'on me dit mais ça semble suffire. Et je sers et dessers les tables sans voir le temps passer jusqu'à 16h30. C'est en regardant l'horloge que je réalise que je n'ai pas fait de pause depuis que j'ai commencé à courir de table en table... "Assied-toi, sers toi une assiette de tout ce qui te fait envie, tires-toi une bière" me dit Jannis, et je ne me fais pas prier ! Les plats que j'ai servis toute la journée avaient une sacré bonne tête ! Un peu d'argent de poche n'est jamais mal reçu, Jannis me glisse 2 billets dans celle de mon pantalon et me remercie pour le coup de main. Encore une journée de pause bien reposante ça !

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Je termine de vous écrire tout ça du fond de mon lit, et l'heure tourne (il est 23h23 !!) ! Alors pardonnez le petit retard, mais je publie lundi ! 

 

La bise ! 

Et merci à la photographe en cheffe de la semaine, sans qui les quelques photos de ce post ne serait pas là : Zoé Bean 

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