KAM - Sédentarisation, vol.2

Une semaine à la petite ferme de Kastri, au milieu des montagnes et encore une fois 7 nuits consécutives dans un lit ! Voilà un aperçu de la vie d'ouvrier-invité que je mène depuis dimanche dernier ! Bonne lecture, ou bonne écoute !

 

Commençons par une brève présentation de la ferme, maintenant que j'ai pu appréhender les multiples facettes de ce lieu, de ses occupants et de la.vie qu'ils y mènent : la propriété s'entends sur plus de 20 000 m², soit 2 hectares, répartis en une multitude de terrasses entourant la maison. Celle-ci est en pierres, traditionnelle dans sa forme et ses fonctions (on trouve notamment un pressoir taillé dans la roche enfouis au fond d'une petite pièce qui sert aujourd'hui à stocker le bois au sec). Lynda et Reay ne comptent pas sur leurs terres pour vivre. Ils sont aujourd'hui retraités, et se contentent de prendre soin de leur terrain pour limiter autant que possible les risques d'incendies et la junglification des terrasses (à tendance rapide avec la chaleur ici). Les arbres sont pour la plupart trop vieux pour espérer en tirer de réelles récoltes, et bon nombre de murets entre deux niveaux s'écroulent par endroits, malgré les interventions d'ouvriers-artistes en murs de pierres sèches (trop chères pour réparer plus que l'indispensable). Mais mes deux locataires prennent malgré tout un soin détaillé de la végétation ainsi que de la terre qui la porte, et c'est avec plaisir que je les aide dans leur tentative de maintien "en l'état" de ce coin de paradis.

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 Les journées se ressemblent sur beaucoup d'aspects, et un petit rythme s'est installé : travail dans la matinée, jusqu'à 13 ou 14h, puis pause, chacun vaque à ses occupations jusqu'à 15h30, on mange, puis sieste ou re-vacation, et enfin on dine autour de 21h30 après avoir passé un moment ensemble dans la cuisine pendant que Reay fignole le dîner. 

J'ai fait plein de chose, je vais vous mettre ça en vrac plutôt que de faire un récit détaillé jour par jour qui pourrait être un peu répétitif... 

La poursuite de la guerre du lierre : D'autres valeureux arbres de toutes sortes ont vu leurs troncs et branches allégées de plusieurs kg, et l'éprouvante sinon fatale étreinte de ce locataire envahissant se desserrer enfin. J'ai scié des branches de lierre plus grosses que mes biceps (ok ils sont pas au top en ce moment mais quand même), grimpé au plus haut dans les branches des prisonniers au secours desquels il fallait voler, et me suis laissé pendouiller tel un tarzan en t-shirt (seule différence notable finalement) au bout de lianes un peu trop bien accrochées. J'ai tout donné, et ça a porté ses fruits. Cool !

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Mission accessibilité : À l'angle le plus reculé de la partie basse du terrain se trouve une petite terrasse traversée par un canal (sec en ce moment). L'accès y est difficile, la pente n'est pas vraiment praticable, encore moins les bras chargés d'outils, alors je suis missionné par Lynda de tailler des marches qui facilitent la descente et la remontée de cette pente bien raide. Pioche et bêche, sueur qui coule à flot, ampoules dans les paumes de mains je me lance dans la creusade (croisade?). Je suis libre quand à la méthode apparemment, alors je décide de creuser des trous, que je remplis d'un bloc de rocher avant de remblayer autour pour niveler à la hauteur du semblant d'affleurement ainsi créé. Une petite vingtaine de marches voient donc le jour en une demi-journée, et c'est effectivement plus pratique avec. Ça semble tenir, j'espère que ça tiendra aussi dans le temps ! 

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Le pont : Même endroit, la traversée du canal n'est pas aisé. Je suggère un petit pont, basique, qui serait relativement simple à mettre en place avec les grosses planches que j'ai vu dans la remise. Proposition acceptée, mais il falloir faire ça bien, prévoir des marches (encore eh oui) qui descendent jusqu'aux planches des deux côtés, et pelleter un sacré paquet de terre caillouteuse : parfait j'ai des cales qui ont commencé à apparaître dans les paumes (petites hein). 

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La palissade "foxproof" : Loin d'être un chef d'œuvre vue au travers du prisme des conventions esthétiques communément admises - pour ne pas la qualifier d'horrible - elle sera au moins fonctionnelle. La méthode est la suivante : 

1 - planté de grands pieux en acier rouillé (petites poutres en T, section contenue dans un carré de 2,5 à 3 cm de côté pour ceux que ça peut intéresser).

2 - fixation de grilles types "fer à béton" (tressage de tiges d'acier soudées, mailles de 10 à 15 cm de cotés) à l'aide de fil de fer.

3 - ajout d'une couche de grillage à poule fin, lui aussi arrimé à l'aide de fil de fer. Cette dernière étape fut réalisée en plusieurs fois, car Reay a commencé par acheter 10 m linéaires de grillage pour un pan de clôture qui en fait bien 60 ("but it seemed sooo long when he unrolled it on the ground..."). On a donc attendu la seconde viré à Tripoli pour pouvoir terminer.

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Entre temps, je dédie mon temps libre à m'étirer quotidiennement au soleil, à bouquiner, apprendre quelques mots de grec en plus ou broder mon drapeau. Il m'arrive aussi de retourner tailler quelques marches pour finir de me défouler si j'ai besoin d'être dehors.

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Mercredi 29/03.

Aujourd'hui j'ai la journée libre. Depuis que je suis arrivé, je lorgne sur la montagne la plus haute visible depuis la maison : le Μεγάλη Τούρλα (Megali Tourla). Lynda et Reay m'ont dit qu'ils y allaient avec les woofers avant, mais qu'ils ne se sentent plus l'énergie aujourd'hui, alors je pars seul. Il me faut d'abord une petite heure de vélo pour rejoindre le couvent de Ιερά Μονή Μελανές (Iera Moni Melaves) où j'abandonne Gabi pour quelques heures, planqué dans les fourrés. Ce couvent je le vois depuis la maison, il n'est pas beaucoup plus haut et à moins de 6 km à vol d'oiseau. Mais la route est si sinueuse que je dois parcourir près de 20 km pour y arriver ! 

Je m'impose un rythme bien soutenu pour grimper jusqu'au sommet, c'est une super jolie rando et j'alterne les phase de marche et de course en fonction de la pente. Les paysages sont variés, les forêts gardent une humidité et une fraîcheur qui contraste avec les prairies plus sèches parsemée de grands genévriers. Les températures ne sont pas bien hautes, et en arrivant à l'alpage que domine le sommet je trouve des flaques bien gelées et des billes de neiges roulée calées contre les touffe d'herbe. Il est 11h quand je m'assois en haut de cette montagne qui culmine à 1920 m (pas loin les 2000m, dommage !) pour admirer le paysage : la baie de Navplio est superbe vue d'ici, et quelques massifs voisins se demarquent par leur couverture blanche : à cette altitude le printemps ne fait que commencer. Je redescends pique-niquer dans la prairie, mais ne m'éternise pas car le petit vent me fait claquer des dents. Redescente au pas de course, grisante sensation d'avaler la distance et le dénivelé durement gagnés le matin à une vitesse indécente en sens inverse, j'en oublierai presque que mes quadriceps commencent à crier leur manque d'entraînement à ce type d'effort...

Petites pause coca (mince c'est rémunéré ou pas ce genre de mention ?) à Agios Petros sur la route du retour et je rentre pile poil pour la pause café de Reay et Lynda, qui viennent de s'asseoir. Nickel ! 

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Ma formation de boulanger avance elle aussi : j'ai mis la main à la pâte de 3 fournées sur les 4 qu'on a englouti cette semaine. Et j'ai même assuré seul la réalisation de deux d'entre elles, avec une petite expérience ratée (j'ai voulu faire une pâte plus sèche pour me passer du moule et laisser plus de place à mon imagination mais c'était visiblement encore trop liquide...). Bref, les fourneaux n'ont qu'à bien se tenir, quand je rentre c'est boulangerie !

J'apprends aussi en aidant Reay dans sa cuisine, un curry à l'indienne (son beau-frère vient du Punjab), des beignets (les pakora de la semaine dernière sont revenus au menu), des tsaziki de toutes les couleurs, une focaccia aux tomates séchées, un cake aux fruits, etc. 

 

Ce matin (dimanche), quand la pluie nous a chassé de la terrasse sur laquelle nous étions occupés à ratiboiser toutes les repousses d'un couvert de petits érables, j'ai profité du temps restant à ma matinée pour me lancer dans une grande lessive. Alors oui, ici pas de machine, c'est à la mano ! J'avais pas mal de linge sale, malgré une rotation infaillible entre tenue du soir et de la journée (basiquement avant/après la douche) héritée directement des semaines de bivouacs à vélo, et ça m'a refait les épaules ! Le jeux en vallait la chandelle (Larmina), la couleur de l'eau qui s'écoule de mon sceau après le deuxième lavage en témoigne - dans les tons de gris foncé, avec quelques nuance de marron et même de bleu lorsque j'essore mon pantalon. Mon linge termine de s'égoutter sur le balcon (pas évident de faire aussi bien qu'un essorage à 1200 tour/minutes), à l'abri de la pluie mais pas du vent ! 

 

Encore quelques jours ici et je file à Corinthe, d'où nous partirons avec Alicia pour un tour du Péloponnèse par sa côte que l'on m'a maintes fois vanté. Les quelques souvenirs que je garde de ces paysages, issus de vacances à Kantia étant gamin, vont eux aussi dans ce sens et j'ai hâte de (re)voir ça ! 

 

La bise !

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